Dans un contexte économique et social incertain, se poser les bonnes questions en matière de stratégie patrimoniale, notamment de transmission, est crucial.
Donner de son vivant est une solution judicieuse pour anticiper sa succession et assurer l’avenir de ses héritiers – enfants ou petits-enfants – en les accompagnant dans leurs projets de vie au moment où ils en ont le plus besoin. Alors que le démembrement viager d’actifs immobiliers détenus en direct est assez répandu, celui de parts de SCPI reste peu usité ; il présente pourtant de multiples atouts, tant pour le donateur (usufruitier) que pour le donataire (nu-propriétaire).
Principe du démembrement viager de parts de SCPI
Le démembrement viager en SCPI implique la division de la pleine propriété des parts en SCPI en deux parties bien distinctes : la nue-propriété de la part de SCPI et l’usufruit de la part de SCPI. Cette stratégie s’avère particulièrement pertinente pour transmettre une partie de son patrimoine immobilier à ses ayants droit.
Le démembrement est dit « viager » lorsque celui-ci prend fin au décès de l’usufruitier. Le nu-propriétaire récupère alors dans son intégralité la pleine propriété de la part de SCPI et les loyers afférents, sans droits de succession supplémentaires.
Concernant la transmission des parts, deux cas de figure sont possibles :
1. Le donateur (usufruitier) possède déjà des parts de SCPI en pleine propriété. Dans ce cas, ce dernier, percevant les loyers le temps de son vivant, utilise le démembrement viager pour donner la nue-propriété aux donataires et préparer la transmission du patrimoine.
Cette première solution sera recommandée avec l’intervention d’un notaire pour acter la donation des parts. Si son intervention implique certes le paiement de frais de notaire qui comprennent les émoluments réglementés (rémunération en contrepartie d’une prestation précise), les honoraires libres et non règlementés, les débours, les droits et taxes1), son conseil est fortement recommandé, notamment pour utiliser les avantages de la donation-partage mais aussi, pour protéger le conjoint vivant en incluant une clause de réversion d’usufruit à l’acte.
2. Donateur et donataire co-souscrivent directement des parts de SCPI en démembrement viager. Ce dispositif permet de diminuer conséquemment les droits de succession lors du décès des parents. Il sous-entend une décision anticipée et concertée entre les co-souscripteurs et un transfert de liquidités préalable à l’investissement au travers d’un don manuel de sommes d’argent (qui peut se réaliser sans aide en complétant le formulaire cerfa n°2735 dédié.). Cette solution n’impose pas de recourir aux services d’un notaire.
Comme pour le démembrement viager d’un bien immobilier détenu en direct, l’âge de l’usufruitier fixe la répartition de la valeur fiscale des parts de SCPI démembrées entre usufruitier et nu-propriétaire. Le barème fiscal applicable est défini par l’article 669 du Code général des impôts (cf. annexe).
Philippe Lauzeral, directeur général du groupe Stellium, précise par ailleurs que « Les SCPI fiscales ne sont pas concernées par la possibilité de transmission en démembrement viager ».
Transmettre de son vivant à des conditions fiscales avantageuses
Le principal avantage du démembrement viager de parts de SCPI est fiscal. En effet, la nue-propriété a une valeur plus faible. Les droits de donation portant sur cette valeur en nue-propriété seront donc moins élevés.
Cette solution permet d’optimiser l’abattement sur les donations, fixé chaque 15 ans à 100 000€ par enfant et par parent. Ce seuil est porté à 31 865€ entre grands-parents et petits-enfants.
Les personnes handicapées bénéficient d’un abattement spécifique de 159 325€, cumulable avec les autres abattements.
Dans le cadre d’un don préalable et d’une souscription entre donateur (usufruitier) et donataire (nu-propriétaire), il est possible de cumuler d’autres abattements comme l’exonération totale de fiscalité au titre des « dons familiaux », sans dépasser la limite des 31 865 € tous les quinze ans (art. 790 G du CGI).
Cet avantage est soumis à des contraintes d’âge, le donateur devant avoir moins de 80 ans et le donataire plus de 18 ans. Celui-ci doit être un enfant, petit-enfant ou arrière-petit-enfant du donateur, ou encore, si ce dernier n’a pas de descendant, un neveu ou une nièce.
Anticiper sa succession tout en continuant à percevoir des revenus
Utiliser le démembrement viager pour la transmission de ses parts est avantageux pour l’usufruitier, car il pourra continuer à percevoir les revenus générés par la SCPI tout en anticipant, de son vivant, une transmission optimisée.
Aussi, passer devant un notaire présente, dans le cas de plusieurs héritiers, l’avantage d’acter une donation-partage et, on l’a vu, d’insérer des clauses spécifiques et protectrices.
Pour le nu-propriétaire, outre le fait qu’il récupérera sans frais ni formalités, la pleine propriété des parts de SCPI au décès du donateur, cette solution lui permet d’amorcer la constitution d’un patrimoine immobilier via les SCPI sans alourdir sa fiscalité (revenus fonciers sur les loyers et impôt sur la fortune immobilière, notamment).
Le plus tôt est le mieux
Il convient de rester vigilant quant à la valeur de la nue-propriété, calculée en fonction de l’âge de l’usufruitier. Ce, pour éviter un dépassement du plafond des 100 000 € d’abattement et, à ce titre, risquer d’être taxé sur une partie de la valeur en nue-propriété des parts.
Véritable opportunité, notamment pour les familles qui souhaitent éviter des situations complexes d’indivision, la donation en démembrement viager de parts de SCPI se révèle une solution judicieuse. « Avec un ticket d’entrée faible, elle s’intègre bien aux côtés de stratégies de transmissions également possibles via l’assurance-vie par exemple, où il est possible d’effectuer des démembrements de clause bénéficiaire notamment dans le cadre de transmission de capitaux importants » conclut Philippe Lauzeral.