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Les conséquences d’une erreur dans la nature du bail commercial

Un recours frauduleux au bail dérogatoire peut avoir des conséquences graves pour le bailleur.
 

La Cour de cassation a rappelé, dans un arrêt récent, que la fraude corrompt tout, rendant inapplicable le délai de prescription de 2 ans. Les bailleurs doivent donc être vigilants et respecter les règles en vigueur pour éviter de se retrouver en situation délicate.

 

Se tromper dans la nature du bail commercial peut avoir des conséquences significatives pour le bailleur. Un recours frauduleux au bail dérogatoire prive le bailleur du délai de prescription applicable à l’action du locataire. Le statut des baux commerciaux est très protecteur des intérêts du locataire, notamment en ce qui concerne la durée du bail, qui ne peut être inférieure à 9 ans. Pour contourner cette règle, le propriétaire peut proposer un bail dit dérogatoire. La durée de ce type de bail est libre, mais limitée à 3 ans (2 ans dans cette affaire, alors sous l’empire de l’ancien article L 145-5 du code de commerce).
 

Les parties peuvent donc conclure soit un bail unique de 3 ans (ici, 2 ans) ou moins, soit plusieurs baux successifs dont la durée totale n’excédera pas 3 ans. Lorsque le bailleur ne respecte pas ces règles et multiplie les baux de courte durée, il risque de se trouver en fâcheuse posture.
 

Dans les faits, un propriétaire conclut avec un même locataire, sous des noms différents, 3 baux successifs de courte durée, sur une période de 7 ans. Les deux premiers baux ont une durée de 23 mois chacun ; le dernier, une durée de 36 mois. Lorsque ce bail arrive à échéance, la société locataire se maintient dans les lieux, et le bailleur attend une dizaine de jours pour lui délivrer un congé, puis une assignation en référé afin d’obtenir son expulsion.
 

La locataire contre-attaque en demandant au juge la reconnaissance d’un contrat soumis au statut des baux commerciaux, invoquant le non-respect des règles par le bailleur. La durée totale des baux a excédé les 2 années prévues. Et, selon la loi, si le locataire « reste et est laissé en possession, il s’opère un nouveau bail » commercial. Pour se défendre, le bailleur fait valoir que la demande de requalification du locataire est prescrite, faute d’avoir été engagée dans le délai de 2 ans applicable aux actions relatives au bail commercial (art. L 145-60 du code de commerce). Pour la cour d’appel, aucun doute possible : l’action, entreprise plus de 5 ans après la conclusion des contrats en cause, est en effet prescrite.
 

Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation censure cet arrêt, au nom d’un principe général du droit, clairement rappelé ici : « fraus omnia corrumpit », « la fraude corrompt tout ». En l’espèce, elle rend inapplicable le délai de prescription de 2 ans.
 

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