Décembre 2021
Bien que 2020 conserve la palme de l’année boursière la plus folle de cette dernière décennie, 2021 est loin d’avoir été pauvre en émotions. Relire les textes de la fin d’année dernière nous rappelle à quel point il est aussi difficile qu’arrogant d’avoir une vision claire du futur, surtout en ces temps troublés. Alors que l’euphorie vaccinale initiée par Pfizer en novembre 2020 réussissait à nous faire oublier notre confinement de l’époque, qui pouvait anticiper que nous finirions 2021 à nouveau tétanisés par un nouveau variant du Covid-19 ? Alors que les conséquences long terme du virus sur nos économies commençaient à se dessiner, qui pouvait affirmer avec certitude que le CAC 40 battrait ses records de 2000, terminerait l’année au-dessus des 7 000 points et surperformerait la plupart des indices mondiaux ? Cette année a encore prouvé avec brio que les prévisions des observateurs n’engagent que ceux qui les écoutent.
Alors que de nombreux risques majeurs sont apparus ou ont empiré cette année (pressions inflationnistes, problèmes de supply-chain, effondrement du secteur immobilier chinois, variants Delta et Omicron), les indices boursiers américains et européens terminent l’année en fanfare. Cette apparente différence entre la réalité et les marchés financiers s’explique par quatre éléments.
– Premièrement, les banques centrales ont affiché un soutien sans faille aux marchés financiers. Rassurant les opérateurs comme une mère rassure ses enfants au moindre bobo, J. Powell et C. Lagarde se sont assurés qu’aucune inquiétude ne pourrait gripper la machine financière, allant même jusqu’à qualifier l’inflation de « transitoire ».
– Deuxièmement, les nombreux plans de soutien budgétaire, Etats-Unis en tête, ont permis une vive relance de la machine économique des deux côtés de l’Atlantique. En cumulant soutien monétaire et budgétaire, ce sont ainsi 13 $T (vous avez bien lu) qui ont été injectés dans le système aux Etats-Unis seulement.
– Troisièmement, les résultats des entreprises ont été excellents. Chaque phase de publication a d’ailleurs correspondu à une phase haussière des marchés. Malgré les problèmes de supply-chain affectant certains secteurs plus que d’autres (comme l’automobile), chaque trimestre de publication a vu de nombreuses entreprises revenir à des niveaux de rentabilité et des chiffres d’affaires supérieurs à 2019.
– Enfin, l’absence d’alternative aux actions a été le dernier facteur favorable à la hausse de 2021. En effet, qui veut investir sur les marchés obligataires sans être rémunéré pour son risque, à fortiori dans un contexte inflationniste ?
Cette évolution favorable des indices est néanmoins un trompe-l’œil. Alors que le marché est plus concentré que jamais, la tenue des indices boursiers est loin d’être aussi bonne que le laisse suggérer leur performance affichée. Il suffit de corriger la performance du S&P 500 de celle des GAFAM et la performance du CAC 40 de celle des KHOL (Kering, Hermes, Oréal, LVMH) pour s’en apercevoir. Cette concentration du marché sur les groupes exceptionnels explique également la différence de performance entre les grandes capitalisations (CAC 40 +27%) et les petites valeurs sur l’année (CAC M&S +14%). Un delta qui s’observe également aux Etats-Unis.
Dans ce contexte particulier et alors que la Fed entame une phase de resserrement monétaire, nous attendons une année 2022 particulièrement volatile. Alors que l’évolution des indices majeurs restera suspendue à la performance financière des stars de la côte, nous commençons à voir apparaître de nombreuses opportunités parmi les petites et moyennes capitalisations. Ce segment, qui a brutalement corrigé à travers le monde depuis l’apparition d’Omicron, semble en cette fin d’année particulièrement attractif.
Quoi qu’il en soit, 2022 ne dérogera pas aux précédentes quant à la mission des gérants : se détacher du bruit et des considérations trop globales pour s’assurer que seules les entreprises les plus performantes constituent son portefeuille.
– Article rédigé par Thomas FOURNET, co-gérant de Montbleu Cordée et gérant de D.Fi depuis mi-Avril 2020 –