La BCE promet de continuer à augmenter ses taux d’intérêt pour lutter contre l’inflation. L’institution de Francfort prédit que la hausse des prix va rester au-dessus de son objectif de 2 % pendant trois ans et que la croissance en 2023 dans la zone euro ne sera que de 0,5 %. Analyse de Patrick Barbe, Head of European Investment Grade Fixed Income chez Neuberger Berman.
Comment pensez-vous que les investisseurs et les marchés vont réagir à la hausse du taux directeur de la BCE ?
La décision de la BCE de relever de 50 points de base son taux directeur était attendue. En fait, la surprise « hawkish » est venue de l’annonce de Mme Lagarde qui a indiqué qu’il faudrait s’attendre à une période de hausses régulières à l’avenir. Elle a expliqué que la BCE devrait en faire plus que la Fed, ce qui signifie que le taux directeur de la BCE pourrait potentiellement atteindre au moins 3%. Cette annonce devrait impacter tous les types d’obligations en euros à la baisse.
Que signifient les décisions prises par la BCE aujourd’hui pour l’inflation de la zone euro en 2023 ?
La décision et l’intention de la BCE de continuer à relever les taux devraient entraîner une baisse de l’activité et de la demande en euros, de sorte que nous pouvons nous attendre à ce que la croissance de l’euro en 2023 soit inférieure aux prévisions actuelles de la BCE, estimées à + 0,5 %. Cela devrait impliquer une inflation domestique plus faible, comme dans le secteur des services. Ainsi, nous nous attendons à ce que l’inflation de base, un objectif clé de la politique monétaire de la BCE, soit inférieure aux prévisions de la BCE (4,2%) pour l’année prochaine.
Comment ces mesures vont-elles affecter la stratégie d’investissement de Neuberger Berman à l’avenir ?
La récente chute des prix des matières premières a conduit les entreprises à devenir de moins en moins pessimistes, ce qui implique une croissance économique plus élevée au quatrième trimestre. La BCE a donc décidé d’ignorer le risque lié à l’activité et de se concentrer sur la lutte contre l’inflation. Nous devrions maintenir notre exposition prudente à la duration obligataire là où le rendement du Bund à 10 ans est inférieur à 2%. Cela confirme également notre surpondération du secteur financier.
Quelle décision vous semble la plus notable ? Laquelle vous paraît la plus marquante et pourquoi ?
La décision de réduire le portefeuille du programme d’achat d’actifs (APP) à partir de début mars 2023 est à noter. Cela signifie que la zone euro ne réinvestira pas un montant de 15 milliards d’euros par mois en moyenne, des paiements du principal des titres arrivant à échéance, et ce, jusqu’à la fin du deuxième trimestre 2023. Il s’agit d’un résultat important car le programme d’émission d’obligations d’État en euros va augmenter l’année prochaine, ce qui devrait peser sur les spreads des pays non « core », en particulier sur les échéances longues.