Pour décider que les primes versées sur un contrat d’assurance-vie ne sont pas exagérées, le juge ne peut pas se prononcer uniquement au regard du patrimoine du souscripteur, mais il doit prendre en compte son âge, sa situation familiale et l’utilité du contrat pour lui.
Les faits
Une femme désigne comme bénéficiaires de son contrat d’assurance‑vie une de ses deux filles et les deux enfants de celle‑ci. Après son décès, son autre fille demande le rapport à la succession des primes versées sur le contrat en invoquant leur caractère manifestement exagéré. En effet, les règles du rapport à succession ne s’appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles‑ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés (C. ass. art. L 132‑13).
La demande est rejetée par la cour d’appel qui retient que les primes, d’un montant total de 30 500 euros, n’étaient pas manifestement exagérées par rapport aux revenus et au patrimoine de la souscriptrice à la date du versement, cette dernière détenant environ 150 000 euros de liquidités et étant propriétaire de sa maison et de par‑ celles de terrain.
Censure de la Cour de cassation
La Haute juridiction rappelle que l’exagération s’apprécie au moment du versement, au regard de l’âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur et de l’utilité du contrat pour ce dernier. Il en résulte que la cour d’appel aurait dû se prononcer non seulement au regard de la situation patrimoniale de la souscriptrice mais aussi au regard de son âge, de sa situation familiale et de l’utilité du contrat pour celle‑ci.
Commentaire
Confirmation de jurisprudence. La Cour de cassation rappelle les trois critères du caractère exagéré des primes : âge du souscripteur, situation patrimoniale et familiale, utilité du contrat. Elle rappelle aussi leur caractère cumulatif. Ils s’apprécient le plus souvent selon la méthode du faisceau d’indices, et un critère pris isolément ne suffit pas à exclure l’exagération, ainsi que l’illustre l’arrêt ici commenté.
Ajoutons que ces critères sont aussi limitatifs, les juges du fond ne pouvant pas se référer à d’autres éléments tels que le montant de la quotité disponible (Cass. 2e civ. 4-7-2007 n° 06-11.659 FS-D) ou l’intention du souscripteur d’échapper aux règles du droit successoral (Cass. 2e civ. 23-10-2008 n° 07-19.550 F-D).