Des particuliers achètent en indivision un bien immobilier à l’aide d’un prêt‑relais et de deux prêts amortissables. Sept ans plus tard, les héritiers d’un des indivisaires font valoir une créance à l’encontre de l’indivision au titre des dépenses de conservation que constituent le remboursement par leur auteur d’une partie des mensualités des deux emprunts classiques mais aussi le remboursement du prêt‑relais. La cour d’appel fait droit à leur demande.
Portant l’affaire devant la Cour de cassation, les autres indivisaires avancent l’argument suivant : si le remboursement d’un emprunt immobilier classique souscrit pour l’achat d’un bien indivis peut éventuellement être assimilé, dans certains cas, à une dépense de conservation, il ne peut pas en être de même pour le remboursement d’un prêt‑relais dès lors que « sa nature et son objet s’y opposent ». Pour eux, il s’agit d’une dépense d’acquisition ne pouvant donner lieu à indemnité.
Rejet du pourvoi. Le règlement d’échéances d’emprunts ayant permis l’acquisition d’un immeuble indivis, lorsqu’il est effectué par un indivisaire au moyen de ses deniers personnels au cours de l’indivision, constitue une dépense nécessaire à la conservation de ce bien. Celle‑ ci donne lieu à indemnité sur le fondement de l’article 815‑13 du Code civil, peu important que le prêt soit un prêt amortissable ou un crédit relais.
Ayant relevé que la défunte avait remboursé le crédit relais deux mois après l’achat indivis, la cour d’appel en a déduit à bon droit que sa succession était titulaire d’une créance envers l’indivision à hauteur de la somme ainsi payée.
À noter
L’indivisaire qui engage des dépenses d’amélioration ou de conservation d’un bien indivis sur ses fonds personnels peut prétendre à une indemnité à charge de l’indivision (C. civ. art. 815‑13). La dépense de conservation est celle qui est nécessaire. Il s’agit notamment du paiement des mensualités de l’emprunt souscrit pour l’achat d’un bien indivis. Il en est de même du paiement des mensualités de l’emprunt souscrit par un seul indivisaire à raison de la renégociation du prêt initial. L’arrêt commenté ici nous précise que la nature du prêt remboursé par l’indivisaire (relais ou classique) n’a pas d’importance. Contrairement à ce que soutenaient les requérants, le prêt‑ relais ne peut être qualifié de dépense d’acquisition et échapper à l’article 815‑13. Certes, un crédit relais sert d’apport pour l’acquisition d’un nouveau bien immobilier, en attendant la vente de l’ancien. Mais, précisément, en remboursant la totalité de ce prêt (par prélèvement sur ses comptes personnels), l’indivisaire a bien engagé durant l’indivision ses deniers personnels (provenant pour majeure partie de la vente d’un autre bien personnel) afin de garantir la conservation du bien acquis en indivision.
Source : Cass. 1e civ. 26‑1‑ 2022 n° 20‑17.898 F‑ B
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