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Souscrire un contrat juste avant 70 ans ne garantit pas la non-application de l’article 757 B du CGI

Le bénéficiaire d’une assurance‑vie imposé aux droits de succession du fait de primes versées le lendemain des 70 ans de l’assuré ne saurait reprocher à la banque un transfert tardif des fonds à l’assureur, alors que ce retard résulte du manque de diligence du souscripteur.

Les faits

Un homme souscrit par l’intermédiaire de sa banque un contrat d’assurance‑vie sur lequel il verse 174 000 euros, lors d’un rendez‑ vous avec son conseiller effectué deux jours avant son 70e anniversaire. La banque verse la cotisation à l’assureur qui la réceptionne trois jours plus tard, le lendemain des 70 ans de l’assuré.

Au décès de ce dernier, la valeur du contrat s’élève à 189 000 euros. Le frère et la sœur du défunt, bénéficiaires du contrat, reçoivent le capital déduction faite des droits de mutation calculés en application de l’article 757 B du Code général des impôts. Ils assignent alors la banque en paiement de dommages et intérêts correspondant aux droits réglés à l’administration fiscale, soit près de 49 000 euros pour la sœur et près de 26 000 euros pour le frère. Ils considèrent en effet que la banque a commis une faute en transférant tardivement les fonds à l’assureur, les privant ainsi du régime fiscal plus favorable applicable aux primes versées avant les 70 ans de l’assuré.

Décision

La cour d’appel rejette leur demande et retient notamment que :

  • les bénéficiaires ne produisent aucune preuve de l’intention manifeste du souscripteur de verser les fonds avant ses 70 ans ;
  • le souscripteur avait tout loisir de s’adresser à un autre établissement s’il estimait que la banque n’était pas assez diligente pour fixer un rendez‑vous avant ses 70 ans ;
  • l’assurance‑vie présente un intérêt fiscal non négligeable, que les primes soient versées avant ou après l’âge de 70 ans.

Elle ajoute que l’application du régime fiscal de l’article 757 B du CGI ne résulte pas d’un manque de diligence de la banque dans le versement des fonds à l’assureur, mais d’une prise de rendez‑ vous tardive pour signature du contrat dont il n’est pas établi qu’elle est imputable à la banque.

À noter

Cette décision illustre l’importance du critère de l’âge de l’assuré lors du versement des primes, souvent décisif dans la détermination du régime fiscal applicable aux bénéficiaires d’un contrat d’assurance‑ vie en cas de décès. En l’espèce, les primes ayant été versées après les 70 ans de l’assuré, les sommes transmises aux bénéficiaires ont été soumises aux droits de succession à concurrence du montant de ces primes, suivant le degré de parenté existant entre les bénéficiaires et l’assuré, après application d’un abattement global de 30 500 euros réparti entre les bénéficiaires au prorata de la part leur revenant (CGI art. 757 B). Cela s’est traduit, pour ces derniers, par un montant de près de 75 000 euros de droits de succession à payer. Si les primes avaient été versées avant les 70 ans de l’assuré, les sommes transmises aux bénéficiaires auraient relevé du régime du prélèvement spécifique (CGI art. 990 I, I). Compte tenu des montants en jeu, les intéressés auraient alors échappé au prélèvement en raison de l’abattement de 152 500 euros applicable à chaque bénéficiaire.

Le souscripteur assuré d’une assurance‑vie souhaitant verser des primes avant ses 70 ans pour que les bénéficiaires se voient appliquer le régime fiscal du prélèvement spécifique a donc tout intérêt à anticiper la démarche auprès de l’assureur ou de l’intermédiaire, afin que l’opération soit effectuée en temps voulu.

CA Paris 7‑9‑2022 n° 20/13206

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